2e projet de loi de finances rectificative 2020 : de nouveaux crédits pour les entreprises (mise à jour du 27/04 à 9h30)
Le plan d’urgence économique mis en place en mars à hauteur de 45 milliards d’euros pour soutenir l’économie et l’emploi est étendu et renforcé, pour atteindre plus de 110 milliards d’euros. Le fonds de solidarité et la garantie des prêts par l’État seront modifiés.
Mise à jour du 27/04
La loi no. 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020 est parue au Journal officiel du 26 avril. Les IA correspondant aux développements ci-après sont en cours d'actualisation.
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Dans son allocution du 13 avril 2020, le Président de la République a annoncé la prolongation du confinement jusqu’au 11 mai, puis un déconfinement très progressif à compter de cette date. Il a souligné les conséquences sociales et économiques du fort ralentissement de l’activité dans notre pays, jusqu’à son arrêt dans certains secteurs. Il a proposé que les réponses apportées en la matière par la loi de finances rectificative du 23 mars 2020 soient complétées et renforcées. C’est chose faite avec le dépôt au Parlement d’un deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2020, quatre semaines à peine après la promulgation du premier texte financier lié à la crise sanitaire, adopté par l'Assemblée nationale le 17 avril 2020.
Le projet tend à renforcer les principaux dispositifs mis en place, en les adaptant à la durée, plus longue que prévue en mars dernier, pendant laquelle ils seront mis en œuvre.
Enfin, le Gouvernement fait état, dans ce 2e PLFR pour 2020, d’un recul anticipé de 8 % de la richesse nationale en 2020, ce qui devrait conduire à observer un déficit public de 9 % du PIB et à constater à la fin de l’année un endettement souverain de 115 % du PIB.
Après une commission mixte paritaire (CMP) conclusive à la mi-journée, le Sénat et l’Assemblée nationale ont définitivement adopté dans la nuit du 23 avril la 2e loi de finances rectificative pour 2020.
1/ Fonds de solidarité
Le PLFR exonère les aides versées par le fonds de solidarité (IA20061) de tout impôt sur les bénéfices et des cotisations sociales associées. Il neutralise également les effets du versement de ces aides pour l’application du régime d’imposition applicable au bénéficiaire (art. 1).
Ces exonérations s’appliqueront indépendamment de la forme juridique ou de l’activité des entreprises, dès lors que ces dernières sont éligibles aux aides prévues par le fonds et en bénéficient effectivement. Par conséquent, le dispositif prévu concernera aussi bien les entreprises imposées d’après un régime réel, simplifié ou non, que celles relevant d’un régime micro-fiscal dans le cadre duquel l’assiette imposable correspond au chiffre d’affaires auquel est appliqué un abattement forfaitaire.
Cette mesure sera adoptée sous réserve de la confirmation de sa compatibilité avec le droit européen en matière d’aides d’État. En effet, face à la crise actuelle, la Commission européenne a assoupli la réglementation européenne relative aux aides d’État afin d’assurer l’adoption de mesures nationales ambitieuses de soutien à l’économie. Cependant, les modalités d’entrée en vigueur des exonérations des aides et de leur absence de prise en compte dans l’appréciation de certaines limites fiscales et sociales sont subordonnées à la réponse positive de l’exécutif européen, et sa date sera fixée par un décret, sans pouvoir être postérieure de plus de quinze jours à la date à laquelle la réponse de la Commission aura été reçue.
2/ Prêt garanti par l’État (PGE)
Le régime d’octroi de la garantie de l’État au titre des prêts consentis par les établissements de crédits et les sociétés de financement (IA20057), à compter du 16 mars 2020 et jusqu'au 31 décembre 2020 inclus, est étendu aux entreprises ayant subi un choc brutal en lien avec la crise sanitaire et la contraction de la demande globale (art. 16).
Ces dispositions :
- précisent le périmètre de l’exclusion du bénéfice des PGE dans le secteur financier. Ne sont exclus que les établissements de crédit et les sociétés de financement. Les autres entreprises du secteur financier devant pouvoir en bénéficier ;
- précisent que la garantie de l’État pourra couvrir des prêts octroyés à des entreprises en procédure collective (redressement, rétablissement, sauvegarde, liquidation, etc.) ;
- alignent les critères du seuil au-delà duquel la garantie est octroyée par arrêté individuel pris par le ministre de l’Économie sur les critères de la définition de la grande entreprise du décret du 18 décembre 2008 (ie : entreprise qui emploie plus de 5000 salariés ou a plus d’1,5 mds€ de CA ou plus de 2 milliards d'euros de total de bilan). Dès qu'une entreprise dépasse l'un de ces deux seuils, la demande de PGE exigera donc un examen plus attentif du dossier. La conséquence directe que cet aménagement est que le champ des grandes entreprises devant recourir à un arrêté du ministre de l’économie pour bénéficier de la garantie augmente.
Auditionnés par la commission des finances de l’Assemblée nationale, le 8 avril 2020, le directeur général de Bpifrance et la directrice générale de la FBF ont indiqué que le PGE est en cours de distribution dans 40 000 agences bancaires, et 13 000 d’entre elles ont déjà conclu un tel prêt, pour un montant moyen de 150 000 euros.
La discussion entre le chef d’entreprise et son banquier porte sur le montant consenti (un, deux ou trois mois de perte de chiffre d’affaires dans la plupart des cas). Le taux, les conditions de la garantie ou la durée du prêt sont fixés à l’avance et ne peuvent faire l’objet de modifications, sous peine de perdre le bénéfice de la garantie.
Les entreprises dont la cotation de crédit va d’« excellente » à « assez faible » au regard des critères de la Banque de France (c’est-à-dire de 1 à « 5+ ») se voient accorder le prêt garanti de façon presque automatique ; celles notées de 5 à 9, dont celles qui traversent une procédure collective, connaissent davantage de difficultés à obtenir le PGE.
Le directeur général de Bpifrance a toutefois rappelé que la banque publique « consent également des prêts directs [et sans garantie de l’État] aux entreprises cotées jusqu’à 5 ou 6, sans conditions d’éligibilité mais à l’issue d’un examen au cas par cas ».
En outre, le Gouvernement a annoncé qu’un amendement au PLFR autoriserait l’État à verser des avances remboursables de trésorerie à ces entreprises, pour un montant total de 500 millions d’euros.
Une nouvelle obligation pèsera sur les banques : elles devront motiver par écrit les refus de prêts de moins de 50 000 € aux entreprises qui respectent le cahier des charges du dispositif de prêts garantis par l'État.
A noter que les entreprises implantées dans des paradis fiscaux seront exclues du dispositif. Initialement envisagée par un amendement du Sénat, cette précision devrait finalement être apportée par voie réglementaire prochainement.
Pour renforcer le plan de soutien aux entreprises, le PLFR consacre l’introduction, pour les très petites et petites entreprises qui n’ont pas eu accès à un prêt bancaire garanti par l’État, d’un mécanisme subsidiaire de prêts participatifs adossés au fonds de développement économique et social (FDES) que le Gouvernement proposait par ailleurs d’abonder d’1 milliard d’euros supplémentaires (art. 16 également).
3/ Déductibilité fiscale des abandons de créances de loyer et accessoires
La déductibilité fiscale des abandons de créances est élargie aux abandons de créances de loyer et accessoires consentis entre le 15 avril 2020 et le 31 décembre 2020 (contre le 31 juillet 2021 dans la version votée par l'Assemblée nationale), dans leur intégralité (art. 3).
Actuellement, les aides et abandons de créance à caractère commercial consentis par des entreprises ne sont généralement déductibles pour les besoins de la détermination de leur résultat imposable qu’à la condition de constituer un acte de gestion normale pour ceux qui les consentent, et les aides et abandons de créances non motivées par des raisons commerciales ne sont pas déductibles (aides de nature financière). L'article précise que ces abandons ne constitueront pas des revenus imposables pour le bailleur, sans toutefois porter atteinte à la déductibilité des charges correspondantes (charges de propriétés, intérêts d’emprunt).
4/ Autres mesures
Le taux de TVA réduit sera appliqué aux tenues de protection (gants, surblouses, charlottes…) adaptées à la lutte contre l’épidémie aux masques et gels hydroalcooliques (art 5).
Le PLFR prévoit que le Gouvernement remettra au Parlement, six mois après la publication de la présente loi, un rapport relatif à la création d’un fonds de soutien permettant d’assurer une indemnisation des préjudices économiques résultant de menaces sanitaires graves non couverts par un dispositif assurantiel et aux conditions de financement d’un tel fonds (art. 21).
De même, le Gouvernement devra remettre au Parlement, avant le 1er juillet 2020, un rapport sur le fonds de solidarité portant sur la participation des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et des entreprises au financement du fonds de solidarité et présentant les montants prévus ainsi que ceux effectivement engagés (art. 25). Ce rapport devra également présenter les engagements de toute nature pris par les entreprises, en particulier celles du secteur des assurances, pour soutenir l’économie dans le cadre de la crise sanitaire et économique actuelle. Il précise les montants prévus et ceux effectivement engagés, notamment s’agissant des mesures prévues par le secteur des assurances en matière d’investissements dans le secteur de la santé. Enfin, il précise l’évolution globale et par type de risque, depuis le 1er juillet 2019, de la sinistralité et des sommes engagées au titre de l’indemnisation des sinistres.
Enfin, le PLFR est également marqué par l’ouverture d’une ligne 20 milliards d’euros sur le budget, pour préparer les futures recapitalisations ou nationalisations d’entreprises stratégiques en difficulté. On pense notamment à l’aérien ou l’automobile. Le Sénat a voulu garantir l’information préalable du Parlement avant toute prise de participation de ce type (art. 22).
Le ministre de l'Action et des Comptes publics a annoncé, le 21 avril, qu'il y aura très probablement un troisième budget rectificatif contenant des dispositions relatives aux collectivités locales, dont les recettes ont commencé à plonger sérieusement depuis le début de la crise.