Avec ce nouveau confinement, qui paraissait théorique il y a encore une dizaine de jours, l’impensable s’est donc produit une seconde fois en l’espace de huit mois.

La propagation hors de contrôle du virus et la perspective d’une saturation de nos hôpitaux exigeaient sans doute de prendre de nouvelles restrictions fortes. Elles sont très dures pour notre vie sociale et économique. Respectueux des lois de notre Pays et des consignes que le Gouvernement assume en responsabilité, nous n’avons d’autre choix que d’en prendre acte et d’exprimer notre soutien au personnel soignant et aux médecins de ville. En première ligne face à cette crise hors normes, ils sont mobilisés depuis plusieurs mois pour protéger nos compatriotes.

Le CNPA leur rend hommage et apportera tout le concours de sa communauté de métiers. Vous avez été très nombreux à le faire très concrètement au printemps dernier.

Merci. Cela, c’est « essentiel ».

Les décisions que le Gouvernement a été contraint de prendre de manière précipitée sont un nouveau coup de massue. Une première vague d’une violence inouïe, suivie d’une reprise certes forte entre juillet et septembre mais dont il faut aussi mesurer tous les contrastes voire la quasi absence selon nos métiers.

Plus généralement, elle reste en trompe-l’œil pour l’industrie comme pour les services, et tout reste encore à faire ou à refaire pour compléter, ajuster, et consolider une situation encore insaisissable et excessivement dominée par le risque sanitaire.

Résiliente, la Profession l’est. Mais pour combien de temps encore et à quel prix ?

Jusqu’à présent, nous avons passé le cap en évitant ou en limitant autant que possible des dégâts considérables : l’Etat a été à l’écoute, présent, réactif, les mécanismes de soutien ont fonctionné à plein, la Profession a été éligible au maximum d’aides, les salaires ont été maintenus, et le plan automobile négocié en juin a produit la relance ponctuelle qui était indispensable à court terme.

Les prochains trimestres s’annoncent comme autant de nouvelles épreuves, et ce d’autant plus que nos entreprises sont toutes fragilisées à des degrés divers. Un trop grand nombre d’entre elles, notamment dépendantes du tourisme, sont encore en état d’urgence absolue. Les immatriculations d’octobre indiquent un avertissement de - 9, 5 % et l’après-vente marque le pas au seuil de l’instauration du confinement.

Avec un recul désormais estimé à 11 % du PIB, l’impact sur le niveau de consommation automobile sera très significatif. L’espoir d’une reprise rapide s’éloigne pour le moment, et le plan de relance annoncé n’est, provisoirement, plus à l’ordre du jour.

 

Gardons le moral

Le moral oscille entre les publications quotidiennes de trop nombreux chiffres commentés par de trop nombreux experts. L’inquiétude, l’amertume et la colère sont partout.

Il faut rester endurants, combatifs, agiles. C’est cela, l’entreprise, et c’est notre ligne de conduite au CNPA.

Nous devons continuer à faire preuve de solidarité, conformément à notre état d’esprit au premier jour de la crise. Solidarité à l’égard de la société en agissant en entrepreneurs engagés, en participant à l’effort collectif par le prêt de véhicules, entre autres, ou la réparation prioritaire des flottes des personnels de santé et des forces de l’ordre.

Mais aussi solidarité entre nos différents métiers : c’est le cœur du projet de notre Maison des Mobilités, désormais installée face à l’Ile Séguin depuis quelques jours.

Si le moment est critique, nous abordons aussi cette deuxième épreuve en étant mieux armés. De même, avons-nous collectivement appris du printemps dernier.

L’acte II du confinement est différent, avec une liberté de circulation plus forte. Les Français ont des masques, ils peuvent se rendre sur leurs lieux de travail, les services publics sont accessibles et un certain nombre d’activités, administrativement fermées en mars, sont ouvertes.

Et pourtant, la contestation de ce confinement est en train de monter. Elle traduit une crise de confiance, ancienne, profonde, et la gravité des chiffres de la pandémie ne parviendra peut-être pas à la contenir. Pire, elle pourrait l’accentuer.

Ainsi, les organisations professionnelles et les entreprises peuvent et doivent compter parmi les espaces de confiance essentiels au Pays.

 

Travaillons partout où c’est possible

Grâce à un dialogue social solide, nous savons fonctionner dans des strictes conditions de sécurité, qui ont permis de faire de nos affaires un lieu sûr.

C’est un point fondamental : les entreprises, dans leur ensemble, représentent en nombre de cas moins de 1 % des contaminations globales. N’en déplaise à Amazon, le virus n’est donc pas une malédiction et notamment pour les commerces physiques.

Pour poursuivre, pour survivre, nous devons travailler partout où c’est possible, conformément aux règles édictées par le Gouvernement dans son décret du 29 octobre dernier.

A l’instar du « clic and collect », le cadre est plus pragmatique qu’au printemps, charge à chacun de s’organiser conformément à la réglementation que nous avons pu à ce stade obtenir.

Aujourd’hui, dans le respect des protocoles en place, nous pouvons livrer les véhicules commandés, les louer, les entretenir et les réparer. Nous pouvons aussi les ravitailler, les dépanner, les contrôler et les recycler, tout en acheminant les pièces et équipements nécessaires. Nous pouvons enfin continuer à former nos salariés, en présentiel et en distanciel.

Il faut en prendre la mesure, même si la situation n’est réellement satisfaisante pour personne.

En dépit des barrières, la Profession est « connectée » à l’ensemble de ses équipes et de ses clients - quitte à les accompagner dans le bon renseignement de leurs attestations de déplacements !...

Innover dans la digitalisation de l’organisation et de la relation -client est d’ailleurs vital pour éviter de subir la concurrence d’un commerce en ligne non régulé et dont la crise permet d’en souligner les effets dévastateurs sur l’emploi et l’aménagement du territoire. Les enseignements à tirer sont sans nul doute à méditer aussi au sein de la filière automobile.

 

Vivons avec le virus

Le cadre établi a bien entendu toutes ses limites. Certains de nos métiers sont ouverts, et d’autres non. Au sein d’une même entreprise, des activités sont autorisées, et d’autres non.

Ce fonctionnement en mode dégradé présente de nombreux inconvénients, tant les incohérences (auto-écoles) et les distorsions de concurrence (stations-services) sont criantes, tant l’hyper-complexité des textes et les listes sur lesquelles les dispositifs d’aides - activité partielle ou exonérations de charges – sont parfois adossés placent les entrepreneurs dans une situation instable. Certains, autorisés à ouvrir, auraient tout compte fait préféré fermer, et d’autres, soumis à fermeture, auraient bien entendu préféré pouvoir ouvrir.

Malgré le soutien massif et la réactivité de la puissance publique pour mettre en place un filet de sécurité au profit du tissu entrepreneurial, force est de constater qu’une approche structurée autour de « listes » (S1, S1 bis, annexes etc.) est devenue trop complexe et anxiogène tout en étant un facteur de tensions et d’incompréhensions.

Un ajustement de la stratégie et de la méthode - en particulier si l’on devait durablement côtoyer ce fléau de la pandémie - est donc indispensable.

« Faire avec » le virus risque de faire durablement partie de nos vies.

Et la vie de tous les jours passe par la mobilité et l’ensemble des acteurs et opérateurs qui la supportent et l’organisent. Comme au printemps, et ailleurs dans le monde, rappelons que le recours à l’automobile s’impose comme une solution de sécurité privilégiée dans le contexte sanitaire. La bonne tenue du marché du véhicule d’occasion illustre cette tendance de fond. Ne l’oublions pas, même s’il ne s’agit pas d’opposer les différents modes de transports entre eux.

Accepter de vivre avec la pandémie implique donc d’aller plus loin pour ranimer l’énergie d’une société qui doit rester en mouvement. Il faut un sursaut, sanitaire, c’est évident, et économique, certainement. C’est parce que la situation est insoluble qu’il faut trouver comment il est possible de combiner les deux.

 

Rallumons les lumières des vitrines

Quels que soient la nature et le niveau des aides publiques, elles ne sauraient en effet suffire à couvrir l’ensemble des pertes. Si rien ne change, les lumières vont s’éteindre partout à travers le territoire, exposant des chefs d’entreprises, leurs familles, leurs équipes à des tragédies humaines.

Au CNPA, tout en tenant compte - c’est notre responsabilité - de la gravité de la situation sanitaire, nous estimons que la vie économique doit continuer, et s’élargir dès lors que les textes législatifs et réglementaires le permettront.

De fait, nos entreprises, toutes « de proximité » au même titre que les commerces de centre-ville, bénéficient de classements réglementaires de type ERP 5 leur permettant de gérer parfaitement la densité du flux de notre clientèle.

Ainsi, nous allons plaider, en lien avec l’interprofession, une réouverture équilibrée et raisonnée d’un plus grand nombre d’activités. Alors que des arrêtés municipaux sont déférés devant la justice, c’est conscients de tous les enjeux que nous soutenons les initiatives visant à rétablir les commerces de proximité - y compris, si nécessaire, celle d’un recours devant le Conseil d’Etat.

La semaine dernière, dans le cadre des discussions parlementaires sur le projet de loi d'état d'urgence sanitaire, un amendement du Rapporteur avait été voté à l’unanimité par le Sénat. Il visait à donner aux Préfets le pouvoir de « permettre la réouverture des commerces si les conditions sanitaires sont réunies ». La commission mixte paritaire a ensuite constaté un désaccord sur cette proposition, le dernier mot revenant désormais à l'Assemblée jeudi prochain, le 5 Novembre.

Nous prendrons donc acte des votes du Parlement, comme des décisions que le Gouvernement a annoncé vouloir prendre à l’issue d’une réévaluation de la situation sous 15 jours. Utilisons-les pour trouver des solutions, sans diviser ni heurter : il s’agit d’avancer.

Il n’est donc pas question de participer à une forme de désobéissance civile, mais au contraire de chercher, dans l’ordre et la concertation locale, des solutions à court terme tout en préparant un déconfinement très robuste.

 

Donnons une perspective

La lutte contre la Covid ne souffre d’aucun compromis avec la sécurité sanitaire. S’il le faut, nous irons plus loin en dialoguant avec nos partenaires sociaux. En tant qu’entrepreneurs indépendants, seuls pénalement responsables, il nous revient de veiller au meilleur management des équipes tout en tenant nos engagements à l’égard de la jeunesse et notamment de nos apprentis.

Il s’agit de porter le regard au-delà des difficultés. Notre filière, au même titre que tous les autres secteurs d’activités, a évidemment besoin d’autre chose que d’aller de confinements en confinements, de plans de soutien en plans de soutien.

Il faut donner une perspective, et tout faire pour rendre la confiance contagieuse en nous laissant faire, en nous laissant travailler.

Il n’est pas soutenable d’être captifs d’une activité devenue en quelque sorte saisonnière qui serait la variable d’ajustement d’une stratégie du « stop & go », fondée sur le partage administratif de l’économie en secteurs « essentiels » et « non essentiels ».

Le commerce et les services ne sont pas davantage de simples accessoires de l’industrie ; dans l’automobile comme ailleurs, il ne s’agit pas d’activités secondaires. Elles sont fondamentales à l’ancrage de filières solides sur nos territoires.

L’un des enseignements du printemps, c’est que toute l’économie se tient ; c’est un tout avec en son centre la mobilité sous différentes formes pour l’irriguer. Tous les secteurs sont en réalité en première ligne, et nous devons tous agir simultanément pour dominer la crise.

Un autre enseignement est de rappeler que la critique est un art facile. L’économie et la société française évoluent sur une ligne de crête, forçant le Gouvernement à trouver un équilibre permanent dont chacun mesure bien les risques considérables.

Pour l’automobile, il s’agit aussi de sortir d’impasses dont les dangers sont accentués par le contexte général.

 

Sortons des impasses par le haut

Pour notre filière, précisément, il faut préparer l’avenir sans perdre de vue, à court terme, le cadrage toujours en discussion du projet de loi de finances 2021. Notre position est claire : comment imaginer une hausse des taxes, notamment foncières, et de la fiscalité automobile sans prendre le risque de paupériser davantage la filière et les Français dans un contexte aussi incertain ?

Alors que chacun navigue à vue au milieu de la tempête, il faut inverser les priorités. L’heure est en effet à la consolidation et à l’extension des dispositifs d’aides à la mobilité, aux technologies et aux infrastructures, et au gel de la fiscalité comme l’a indiqué le Ministre de l’Economie Bruno Le Maire.

Il faut faire des choix réalistes à court terme et savoir reporter des projets qui ne font pas consensus. L’objectif, c’est de sauver des filières entières en 2021/2022, et non d’aggraver une situation déjà redoutablement complexe. Sans entreprises en capacité d’innover, d’investir, de commercialiser et de recruter de nouveaux talents, il est certain que les engagements français et européens fixés pour 2030 et, plus loin encore, pour 2050, deviendront des perspectives totalement abstraites.

Nous proposerons au Gouvernement de surseoir à toute augmentation de la fiscalité automobile en 2021 et d’engager une concertation resserrée sur l’élaboration d’une feuille de route adaptée aux enjeux de la filière et aux attentes de la population.

Par ailleurs, l’équité et l’efficacité recommandent que les baisses de la fiscalité de production s’étendent aux commerces et services de l’automobile dont l’empreinte économique et sociale est devenue première en France.

Sortir des impasses, c’est sortir de la dictature du court terme qui a soumis les acteurs à trop de changements dans des dispositifs publics devenus progressivement illisibles.

A moyen et long terme, le cap reste, plus que jamais, de réussir les transitions écologiques et technologiques. Il est aussi de rassembler très rapidement les acteurs autour d’une stratégie en mesure de développer le plus haut niveau d’emplois et de valeur ajoutée sur le sol national.

Les besoins d’accompagnement des Français, déjà très forts avant la pandémie, vont lourdement s’accentuer avec, hélas, un niveau d’appauvrissement jamais atteint en dépit d’une dépense publique massive. La crise actuelle doit être utilisée comme une opportunité pour co-construire une politique globale et pragmatique recentrée sur le parc roulant et les usages. Mettons cette séquence à profit pour remettre à plat les différents outils - bonus, malus, prime à la conversion etc. - , en évaluer les performances selon une stratégie articulée avec les différents volets du plan de relance.

Au CNPA, nous y sommes prêts. Car les transitions écologiques, technologiques et sociétales ne sont pas des impasses. A condition de changer de logique, ce sont au contraire des opportunités pour la filière des services et les consommateurs.

Nos entreprises, de plus en plus impliquées dans la RSE, sont du côté des solutions. Nos métiers sont un levier exceptionnel de déploiement de stratégies locales, dans les domaines par exemple des bornes de recharge, du recyclage, ou de diffusion des nouveaux usages et des technologies.

Raisons pour lesquelles, loin d’asphyxier des pans entiers d’ETI, PME et TPE, il faut les libérer et les accompagner.

Sortir par le haut, c’est encourager, concrètement, l’inscription des services de l’automobile dans une dynamique positive de modernisation et d’innovation. Un travail exceptionnel est à réaliser dans un cadre collectif et ouvert à toutes les parties prenantes, pour peu d'ouvrir et de donner de la perspective aux fonds publics mis en place.

Nous continuerons à présenter des propositions en ce sens au Gouvernement. Là encore, il faut aller plus loin, plus fort, sans confondre vitesse et précipitation. Les acteurs, comme les consommateurs, ont besoin de temps !

 

« Avec Vous »

Aucune difficulté ne sera épargnée au cours des prochains mois. Rien ne sera facile. Ensemble, restons à la fois humbles, pragmatiques et confiants. « Entre possible et impossible : deux lettres, et un état d’esprit ». Posté au milieu de ses professionnels, le CNPA sera donc mobilisé.

Nous continuerons à assurer notre mission d’intérêt général avec plus de détermination encore que lors des mois précédents.

Nous continuerons à porter les intérêts de nos métiers, sans en oublier aucun, afin que les choix des Pouvoirs Publics intègrent leurs réalités quotidiennes.

Nous continuerons à être force de propositions face aux défis à relever - avec nos écoles, nos institutions de formation et de prévoyance, ou de santé.

Nous continuerons à vous accompagner au quotidien, en vous apportant les meilleurs éclairages sur l’application des protocoles sanitaires, l’évolution de la règlementation, l’organisation du travail, le recours aux dispositifs publics.

Nous continuerons à être un point de repère en assurant la promotion la plus active de la Profession. Car elle n’est pas seulement « essentielle » au sens d’un bien ou d’un service de première nécessité : la mobilité est d’abord un moteur de l’économie et de la société.

Enfin, nous continuerons à travailler avec le Gouvernement et nos partenaires à la conception d’un grand plan de relance, adapté et accessible à tous en 2021. Cette crise est un accélérateur de transformations. Elles sont incontournables. Les Français en ont besoin autant que nous.

Nous serons « Avec Vous » pour permettre à notre filière de passer les épreuves, et préparer sa reconquête avec tous les jeunes entrepreneurs et métiers qui ont rejoint nos rangs.

Nous agirons « pour votre avenir », bon courage à toutes et à tous,

 

Le 1er Novembre 2020,

Francis BARTHOLOME, Président National          Xavier HORENT, Délégué Général